
Imaginez un monde, un monde ou tout ne serait que silence… Un monde ou vous verriez passer la vie, sans un seul bruit…Quel ennui me diriez vous ! Et vous auriez raison ! Pourtant, le monde du cinéma a connu cette ère de silence, pour s’en affranchir et arriver à vous faire frissonner, pleurer, éclater d’émotion dans votre fauteuil au son des voix et de la musique qui ponctue un film, il en a fallu beaucoup… A travers ces quelques pages, nous retracerons l’histoire palpitante de la bande son, de ses origines a nos jours… Vous découvrirez ainsi un nouveau monde, un monde empli d’éclat mélodieux…
Aux origines :
Vers le milieu du XIXe siècle, certains chercheurs s'intéressent à la décomposition du mouvement. Ils s'inspireront de jouets qui donnent, par la succession de dessins mobiles, une illusion de mouvement. Dès 1863, les progrès de la photographie permettent de faire des instantanés. Après les travaux de l'Américain Eadweard Muybridge sur la décomposition du mouvement, le Français Étienne-Jules Marey met au point en 1888 le chrono photographe, ancêtre de la caméra, qui capte plusieurs images par seconde. Thomas Edison invente alors le kinétoscope, armoire dans laquelle un spectateur peut suivre le spectacle enregistré, et en 1895, les frères Lumière réalisent le premier appareil de projection capable d'assurer de manière satisfaisante la prise de vue comme la projection, c’est le cinématographe, qui fera d'eux, après Edison, les pères du cinéma.
Du premier film des frères Lumière, en 1895, (le Jardinier, plus tard renommé : l'Arroseur arrosé) au Chanteur de jazz (Jazz Singer), en 1927, le cinéma fut majoritairement muet. La bande son était inexistante, on parle alors de film silencieux ou bien muets, constituée de musique enregistrée sur disque ou encore jouée en direct devant les spectateurs. C’est aussi l’époque des « bonimenteurs », qui racontent, commentent l'action, la situent dans l'espace et le temps, prêtent leur voix aux acteurs, révèlent leurs pensées, leurs sentiments. Ils lisent aussi les intertitres à un public majoritairement analphabète… Le cinéma est à ses débuts une sorte de spectacle de foire. Qui draine pourtant les foules. Des foules découvrant un spectacle non encore reconnu comme un art a part entière, mais plutôt une curiosité, un bon spectacle…
Cependant, très tôt, des essais de sonorisation furent tentés. D'abord par l'enregistrement du son sur un support séparé, rouleaux de cire, disque, ou seconde pellicule impressionnée par un procédé photoélectrique. Mais chaque fois, la difficulté majeure était la synchronisation avec l'image et l'amplification. Devant l’impossibilité technique de l’époque a produire une véritable bande son, plusieurs inventions font leur apparition, comme le cinémultiphone Rousselot, ce meuble électrique à clavier était capable de produire soixante bruits fondateurs destinés à accompagner les films, ou encore « l’orgues à bruits », meubles où se trouvaient réunis divers instruments a bruitage dont le fonctionnement n'exigeait qu'une seule personne.
Naissance de la voix dans le septième art:
Dès 1908, le cinéma cesse d'être une activité strictement commerciale pour se revendiquer comme un art ! C’est l’émergence du cinéma de fiction. Le cinéma a cette époque, devient le témoin moral de l'histoire et permet de faire passer des messages. Mais c’est aussi à cette période qu’apparaissent les premières « stars ». Max Linder est alors considéré comme étant une des personnalités les plus rémunérées du cinématographe sur l'échelle mondiale, Charlie Chaplin débutera sa carrier d’acteur, Stan et Ollie, plus connu comme Laurel et Hardy font leur début. La guerre de 14-18 est pour le cinéma une période faste pendant laquelle le septième art découvre de nouveaux domaines et affirme ses moyens d'expression et dès 1919 on rentre de plein fouet dans une période d'épanouissement.
Aux États-Unis, Hollywood devient la capitale du cinéma, et attire les plus grands acteurs et réalisateurs. Cecil B. DeMille, Buster Keaton ou encore Charlie Chaplin rallient Hollywood ou il fait bon être et tourner en masse. Pourtant, le cinéma a cette époque à un besoin vital de renouveau. La plupart des thèmes on était déjà abordés, les décors les plus raffinés exécutés, les scénarios les plus peaufinés réalisés… Le cinéma voit ses limites et a besoin de quelque chose pour drainer a nouveau les foules. Et ce sont les frères Warner qui se lanceront les premiers dans une nouvelle aventure avec le film parlant. Le film Don Juan (1926) marque un tournant avec une musique ajoutée à l'image, puis arrive le Chanteur de jazz (1927), qui marque véritablement le début du parlant. Cependant, Le chanteur de jazz est livré avec le son sur un disque séparé de l'image. De fait, on ne peut véritablement pas parler de film parlant synchronisé à l’image en abordant Le chanteur de jazz. La Fox en sortant Le septième ciel apporte une réponse définitive à ce problème en enregistrant une piste sonore sous forme optique, dite aussi photographique, directement sur la pellicule à coté de l'image
Des l’ors tout s’enchaînera avec une vitesse proche du son justement… Après plus de 30 ans d'existence durant lesquelles il n'a cessé de charmer son public avec ses images vivantes, le septième art va désormais séduire le monde avec la mélodie de ses musiques comme de ses mots. Les spectateurs s'émerveillent en entendant, de plus en plus souvent résonner dans les salles, la familière mélodie du langage. Cependant, tandis que les réalisateurs et la clientèle des cinémas se réjouissent de ce bouleversement, les acteurs hollywoodiens, eux, qui n'ont toujours travaillé que leur démarche et leur gestuelle, appréhendent de prononcer leurs premiers mots face aux caméras.
La crainte est compréhensible, car il suffit d'une voix un peu trop singulière, pour ne pas dire discordante à l'écoute pour effacer une silhouette des écrans et du même coup rebuter le spectateur. Surtout que les méthodes d’enregistrements n’en sont qu’a leur début. On ne peut pas vraiment parler de restitution de la voix, tout au plus pourrait-on dire, que la voix est retranscrite du mieux qu’elle peut. De ce fait, plusieurs acteurs seront, bien qu'ils aient eu un jeu et un style d'interprétation intéressants, inexorablement oubliés.
Pour d'autres, au contraire, la chance est au rendez-vous, et ce récent bouleversement assoira leur notoriété durant les prochaines années. Parmi eux, figure notamment Greta Garbo, qui, dans Anna Christie de Clarence Brown, prend pour la première fois la parole face à la caméra. Sa voix grave, musicale et sensuelle, lui fera franchir avec succès le cap de la transition entre le muet et le parlant.
De nouvelles techniques :
Début des années 30, plusieurs chef-d’œuvres voient le jour. Le "King Kong" de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack est présenté pour la première fois au radio City Music Hall de New York, Tarzan, le personnage créé par le romancier américain E.R. Burrough est adapté au cinéma avec dans le rôle de Tarzan le célèbre Johnny Weissmuller… Mais c’est en 1935 ou le publique pourra vivre une vraie nouvelle expérience au cinéma. Abel Gance présente la version sonore de Napoléon en diffusant des sons différents sur plusieurs haut-parleurs. Il s’agit là de la première expérience de « perspective sonore » par le procédé Gance-Derbie dont le Brevet a été déposé l’année précédente.
C’est le géant industriel Western Electric, puis Altec, qui reprendront le flambeau et exploiteront les brevets et technologies dans des chaînes complexes allant de la conversion optique/électronique aux enceintes de diffusion. C’est cette même Western Electric qui fera en 1940 la démonstration d’un système stéréo 4 pistes (gauche-centre-droite-contrôle), qui s’adressait d’abord au marché de l’enregistrement de disques.
En 1940, juste avant l’entrée en guerre des États-Unis, on voit apparaître pour la première fois une diffusion sur cinq canaux. La répartition choisie à l'époque est toujours la même que sur les systèmes 5.1 actuels. C’est Walt Disney qui présente ce film révolutionnaire en matière de son avec le procédé Fantasound. Révélé à l’occasion de la sortie de son film Fantasia, ce film et procédé sont une révolution qui n’aura pas de suite, tout du moins pas avant de nombreuses années et pour cause. Tourné en stéréophonie, ce film rencontre des difficultés d'exploitation, la tête de lecture de la piste sonore devant être changée, et tous les équipements de restitution doublés. Cela conduit Disney à en distribuer une version mono qui devint celle de référence.
C’est en 1954 que le 6 pistes magnétiques sur 70 mm est proposé par Todd-AO pour le film Oklahoma. Dans les années 50, Fox et Todd AO vont tenter d’imposer le mixage panoramique des dialogues, une technique qui sera combattue férocement par les autres grands, M-G-M, Warner, Columbia, et Universal, leur principale préoccupation étant alors la standardisation des matériels et surtout l’intelligibilité des dialogues.
La musique:
Le mariage de la musique et du cinéma n’a pas toujours représenté une évidence en soi. Surtout pendant les premiers pas du cinématographe. Et si la musique a toujours eu sa place au sein du 7ème art, elle n’a pas toujours obtenu la reconnaissance qui aurait dû lui revenir. Et ce, malgré l’immense talent des grands compositeurs qui ont marqué l’histoire du cinéma et le succès grandissant des bandes originales de films qui deviennent de nos jours un véritable phénomène. Mais revenons quelques années en arrière :
On se rend compte que la musique permet de mettre en valeur les images et de donner un souffle épique, émotionnel à certaines productions, qui désormais n’hésitent pas à débourser de grosses sommes dans ce domaine. Max Steiner, avec Autant en emporte le vent (1939), ou Dmitri Chostakovitch oeuvrent considérablement pour la musique de cinéma…Les compositeurs de musique, qui à la base, composaient des mélodies pour la radio, salles de concerts ou encore l’industrie du disque, commencent à composer pour le cinéma. Les années 30/50 prennent de fait le titre de « classicisme » au niveau de la musique de film. Et ce du fait, que l’on trouve une prédominance de l'orchestration lourde et chargée. A cette époque, le « négro spiritual » fait également son apparition en salle… C’est aussi l’ère de la prestigieuse collaboration entre Eisenstein et Prokofiev qui définit de nouveaux rapports entre Image et son pour le film « Ivan le Terrible »
Plus tard, Easy rider (1969) innove encore en introduisant de célèbres morceaux de l’époque. Les rockers entrent dans l’histoire du cinéma. Ce qui n’empêche pas Les Beatles d’être détrônés au hit parade par la musique du film Docteur Jivago (1965), de Maurice Jarre. La musique de film connaît un succès foudroyant et c’est John Williams qui bat tous les records avec la partition de La Guerre des étoiles (1976). Nous avons aussi d’autres grands noms, comme : Henry Mancini, à qui l’on doit de fredonner l’air de La Panthère rose, l’inévitable Ennio Morricone, qui restera célèbre pour ses musiques de westerns, comme Le bon, la brute et le truand (1966), Michel Legrand, immense compositeur des Parapluies de Cherbourg (1963)…
Plus récemment nous avons des monstres sacrés, comme : James Horner a qui nous devon entre autre la musique d’Aliens le retour (1986), Hans Zimmer avec Rain Man (1988), Danny Elfman, complice de Tim Burton avec Beetlejuice (1988), Vangelis, grand compositeur, signant les magnifiques partitions des Chariots de feu (1981)… Aujourd’hui, les pianos flirtent avec les synthétiseurs. Tous les genres se mélangent et ce, pour magnifier les plus belles scènes de cinéma.
Du dolby au numérique :
En 1967 Mr Ray Dolby présente le Dolby NR A. C'est un réducteur de bruit de fond qui permet d'améliorer la dynamique du son. Il est tellement révolutionnaire pour l'époque que c'est depuis lors que les bandes son multicanaux (autres que monophoniques) prolifèrent, surtout au cinéma. Entre 1967 et 1977, la révolution du son avance a pas feutrés, sans pour autant proposer un meilleur rendu que le Dolby. Durent ces dix ans, Dolby sort plusieurs concepts, tell que : Le Dolby NR-B, on le retrouvera dans tous les lecteurs de cassettes de bonne facture. On trouvera aussi des enregistreurs équipés du Dolby HX-Pro (Headroom Extension, développé par Bang & Olufsen), système de réglage dynamique du biais, permettant une restitution plus linéaire des aigus, même à fort niveau. Il a la particularité de ne pas nécessiter de décodeur (contrairement au Dolby NR)…
Mais la vraie révolution apparaît en 1977 avec le légendaire film de Georges Lucas ; Star Wars. Ce film est considéré comme le premier vrai film en Dolby Stéréo, même si c'est Apocalypse Now qui marquera le plus artistiquement. Le Dolby Stéréo inventé par Peter Scheiber, révolutionnera le cinéma des années 1980. Le Dolby Stereo, outre la réduction de bruit, permet la restitution du son en surround à partir de seulement deux pistes. Ainsi, on peut obtenir trois voies sonores derrière l'écran, et une voie sonore d'ambiance.
La technique utilisée est celle du matriçage. Très schématiquement, on récupère les 4 voies de la façon suivante :
les signaux des canaux gauche et droite sont en phase (identiques) : ils sont envoyés sur la voie centrale ;
les signaux des canaux gauche et droite sont en opposition de phase (signal de gauche inverse de celui de droite) : ils sont remis en phase et envoyés sur la voie d'ambiance ;
les autres signaux sont conservés sur leurs voies respectives.
A défaut d'être très stable techniquement, à cause du matriçage délicat des pistes optiques, le Dolby Stéréo le sera commercialement. Le système s'impose petit à petit et s'améliore encore en 1986 avec le réducteur de bruit de fond DolbySR (Spectral Recording). Ce système qui devient une norme de fait, permet de banaliser l'utilisation du son multicanal au cinéma et grâce à lui le parc des salles de cinéma est prêt pour l'arrivée du son numérique.
En parlant de Star Wars et de G Lucas…En prévision du tournage du Retour du Jedi, G Lucas demande a Tomlinson Holman, de coordonner un label de qualité sonore lors du tournage. Ce procédé prendra le nom de THX. Le terme THX signifie « Tomlinson Holman's eXperiment ». Contrairement à ce que beaucoup pensent, le THX n'est pas un standard de codage comme peuvent l'être Dolby Digital ou DTS. Mais il s'agit d'un label de qualité faisant l'objet d'une certification par la société LucasFilm LTD. Ainsi, les critères du label THX servant à certifier des équipements audio sont globalement les suivants :
· Qualité sonore, c'est-à-dire la bande passante et les plages de fréquences supportées à différents niveaux sonores,
· Qualité de l'infrastructure (revêtements, fauteuils, etc.), taille, position et orientation des enceintes selon la volumétrie de la salle,
Seule la société Lucasfilm est en mesure de décerner le label THX aux équipements audio de qualité respectant les critères de certification. Ainsi, le label THX est un gage de qualité mais, compte tenu du prix de la certification, peu d'équipements audio sont certifiés et leur coût augmente en conséquence. Ainsi, certains équipements peuvent très bien être supérieurs en qualité et inférieurs en prix car leur constructeur n'a pas souhaité payer la certification THX !
Le numérique :
A partir de 1990, nous assistons à un redoublement des procédés pour atteindre la perfection dans le numérique :
La bataille s’engage véritablement en 1990 avec Dick Tracy de Warren Beatty et le procédé Cinema Digital Sound de Kodak. Son principal handicap était de prendre la place de la piste optique analogique. Mais aussi la qualité n'était pas encore pleinement satisfaisante. Ce système fut vite abandonné
La même année Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau est exploité avec le procédé français L.C Concept. Un code temporel sur la manchette de la copie film pilote un disque numérique séparé. Le procédé est très au point mais la SARL L.C. Concept reste artisanal face aux géants américains et japonais.
L'année suivante Dolby présente le DolbySR.D. Une piste numérique à 5+1 canaux est insérée entre les perforations. Les pistes analogiques DolbySR sont préservées. L'exploitation commerciale ne débutera que mi-1992 avec Batman Returns et le système prend l'appellation Dolby DIGITAL.
Cette même année les studios Universal avec Matsushita mettent au point le DTS, système concurrent et identique au L.C. Concept. Le code temporel du DTS change de forme et de place pour s'inscrire entre la piste optique et l'image. C'était la partie la plus protégée du procédé français. Une bataille juridique et la sortie mondiale de Jurrassic Park de Steven Spielberg annoncent la mort du système L.C. Concept.
Enfin Sony débarque sur le marché du cinéma avec son procédé SDDS. Celui-ci se distingue par ses 7+1 canaux de diffusion reprenant la disposition du 70 mm magnétique. Il nécessite deux pistes numériques disposées sur chaque manchette de la copie film. Le véritablement lancement du procédé eu lieu avec Cliffanger et Last Action Hero.
Le doublage:
Si dans les années 1930, Jean Renoir estime pour sa part que « le doublage est une infamie ». Il n’en reste pas moins, qu’avec le cinéma parlant, c’est posé un problème de taille. L’exploitation des films a l’étranger. Un film japonais projeté en France ou au U.S.A, ne pourrait avoir le succès escompté si il n’était pas doublé. Il faut avouer que lire des sous-titres peut être fastidieux et gâcher le plaisir de voir un film. D’ailleurs, la majorité des œuvres audiovisuelles diffusées en France sont doublées. Elles sont donc diffusées en version française (VF). Cependant, certaines œuvres ne sont diffusées qu'en version originale sous-titrée (VOST, généralement abrégé en « VO »).
Le doublage (ou post-synchro) est un métier complexe, qui nécessite de très bons acteurs pour restituer fidèlement une scène a l’écran. Il ne s’agit pas « simplement » de trouver une bonne traduction, qui exprime le sens de la réplique tout en étant naturelle dans la langue de traduction. Il faut aussi, pour que l’illusion soit créée, que cette traduction soit synchrone avec le mouvement des lèvres des acteurs d’origine. Cette phase du film est hautement contrôlée, et débute avec l’enregistrement par les comédiens, passent en même temps sur la console de l’ingénieur du son, pour finir entre les mains d'un monteur son qui va recaler 70 à 100% des phrases du film. A l'aide d'un logiciel adéquat, il va modifier l'emplacement d'un mot, d'une syllabe voire d'une lettre, de l'ordre d'une demi image à plusieurs images, suivant la précision de l'adaptation et la justesse de jeu des comédiens. Enfin vient le mixage. A son issue, la version de doublage devra être parfaite.
Les voix françaises des acteurs d’Hollywood sont célèbres pour avoir prêté avec talent leurs cordes vocales à des acteurs, que souvent, ils ne connaissent même pas. Ainsi, Benoît Allemane est la voix habituelle de Morgan Freeman, Bernard Lanneau celle de Kevin Costner, Jean-Claude Michel prête ses talents à Sean Connery, Clint Eastwood ou bien Leslie Nielsen… Patrick Poivey séduit par ses voix viriles de Bruce Willis et Tom Cruise dans nombre de ses films… Il ne serait plus concevable d’entendre Tony Curtis dans Amicalement votre sans la légendaire voix de son doubleur : Michel Roux ! Imaginez la même série, le même rôle avec la voix d’Arlette Thomas, qui n’est autre que la voix de Titi (Titi et Grosminet)… Ca casserait le mythe non ?
De nos jours et après :
Aujourd'hui cohabitent sur la copie et sur le marché les procédés analogiques monophonique et Dolby Stéréo SR, et les procédés numériques DTS, Dolby DIGITAL et dans une moindre mesure le SDDS. Si nous devions parler d’un procédé plus qu’un autre, je serais tenté de mettre en avant le procédé DTS… Le standard DTS (Digital Theater Sound) est un standard de codage numérique du son créé par les studios Universal. Par comparaison au standard Dolby Digital, le DTS utilise une compression quatre fois moins importante et numérise le son sur 20 bits au lieu de 16. Il offre donc en théorie une meilleure qualité d'écoute au prix d'un débit plus important. De plus, le DTS se décline selon quatre familles différentes :
· DTS 6, standard 5.1 le plus couramment utilisé, permettant d'encoder le son sur six canaux avec une compression moindre que le standard Dolby Digital.
· DTS ES (Digital Theater Sound Extended Surrond), standard 6.1 utilisant une voie arrière supplémentaire (arrière centrale). Le DTS ES emploie une compression moins importante que le Dolby Digital EX.
Le standard DTS ES possède deux variantes :
· DTS ES Matrix, possédant un septième canal interpôlé grâce aux canaux principaux. On parle ainsi de "virtualisation".
· DTS ES Discrete possédant un septième canal indépendant.
· DTS 24/96 représente un format audio permettant de stocker de la musique en haute définition sur plusieurs canaux. Ce format est principalement utilisé dans les DVD Audio ou les pistes audio complétant des DVD vidéo.
· DTS Neo: 6 est un format permettant de recréer une spatialisation du son (virtualisation) à partir d’une source sonore en stéréo.
L'année 2006 fut un tournant décisif dans la mise en place de la projection numérique au cinéma, aussi bien aux États-Unis qu'en Europe avec l'adoption d'une norme définissant les critères de qualité applicables à cette nouvelle projection. Le film ne sera plus sur un support photographique, et ne sera pas sur un DVD, mais sur un serveur !
Ce serveur, dit « source » est une sorte de boiter dans lequel il y aura le signal image, le son, les sous-titres et d'autres informations y compris de lutte contre le piratage. Toutes ces informations numériques seront disposées et organisées suivant une normalisation précise. On parle de copie numérique ou DCP. Les laboratoires Dolby, Kodak digital cinema et Doremi sont des fabricants de serveur. D'autres suivront probablement. A terme il est envisagé de pouvoir transmettre par satellite ou câble les programmes de cinéma numérique. Cela devrait permettre une grande réactivité des salles en fonction de la demande, ou de la sortie des films.
Cette révolution va bouleverser les pratiques de distribution des films et annonce la disparition progressive du support film pour passer en mode « serveur ». Pour le son au cinéma, en dehors du support, c'est à dire la chaîne A, le reste du dispositif de reproduction du son, la chaîne B, ne change pas. Pourtant, du fait des nouvelles normes de projections, il est d'ors et déjà envisagé de fournir un signal multicanal 5.1 non compressé en PCM. C'est à dire qu'on retrouvera un signal audionumérique non compressé équivalent à celui du CD audio.
Certains rêvent déjà de ce fait d'un son en 10.2, ou 13.1 dans la salle. Ce changement technologique sera probablement une porte ouverte à cette évolution. Les serveurs intégreront très probablement cette évolution qui restera à confirmer dans l'avenir. D'autant qu'une autre solution, la spatialisation virtuelle par traitement informatique, est aussi une alternative très crédible.
Au final :
L'histoire du son au cinéma, nous a montré au travers des films d’époque, ou plus récemment avec, "Star Wars" ou "Apocalypse Now", que chaque avancée technique était le résultat d'un désir créatif et d'une volonté de mise en scène. Hors ce n'est plus le cas du son numérique qui ne doit son apparition qu'aux avancées technologiques. C'est une situation paradoxale où l'imagination est largement dépassée par la technologie. Pourtant, il est indéniable que le passage au son numérique au cinéma a permis un bond en avant qualitatif certain. Le plaisir auditif et sensoriel étant décuplé, la surenchère des effets spéciaux constante, le cinéma de demain nous ferra vivre une expérience sonore sans précèdent.
Il est dans l’intérêt des réalisateurs, studios, financiers et pour ainsi dire tout le monde du cinéma, de nous captiver par un film. Mais n’oublions pas que le cinéma c’est aussi le son qui l’accompagne. « Le seul intérêt de la musique de film est de nourrir son compositeur » disait Stravinsky…L’histoire du son au cinéma nous a bien démontré le contraire…Et pas que l’histoire de la musique, mais celle aussi de la voix, des dialogues, des hommes et femmes redoublant d’efforts pour coller auditivement, « justement » a leur personnage…
M.G